Les pages de références

15.7.19

"Il y a un instructeur à bord ?" me demande Rennes Info



Parfois les navigations sont toutes droites, en espace de classe G et sans histoire. Certains se disent qu'on pourrait se passer de contact radio et donc n'appeler personne. Et parfois, on est content d'être en contact avec un SIV.



Je monte vers 3'500 ft après avoir longé la côte au départ de Dinard/LFRD. Nous avons survolé St-Malo, puis Cancale. Le Mont St-Michel et son immense baie sont devant nous. Juste avant nous, un Diamond DA40 avait décollé depuis l'intersection Juliet de la piste 35 à Dinard, comme nous. Lorsque nous avions rejoins notre machine à pieds, j'avais remarqué que le DA40 était poussé à la main dès la sortie du taxiway vers le parking en herbe. Bizarre ? Il a calé avant de prendre le virage pour aller sur l'herbe ? Un soucis ? Certainement. Mais pendant ma prévol, je voyais l'équipage passer des coups de fil, puis ils avaient remis en route juste avant moi. Comme me le confirme l'échange qu'il on en quittant Dinard "On s'excuse du "contre-temps", il y a dû y avoir quelque chose en dégageant.

Vue radar de la zone alors que je suis dans la baie du Mont St-Michel

Je suis sous les nuages à 3'500 pieds. En plein sur ma directe vers Toussus. Tout droit. J'ai mixturé et m'occupe à voler droit avec cette machine qui penche. C'est tranquille. Fin de week-end. Je suis sur Rennes Info qui m'a donné un code transpondeur et m'a identifié. Un peu comme du Flight Following.

J'entends 2, 3, 4 fois le contrôleur de Rennes tenter d'appeler le DA40. "N-xxxSG Rennes Infos ?". Personne ne réponds. C'est bien l'avion qui était devant moi. J'avais noté cette immat. en November, un DA40 et la phraséo in french. Il se passe de longues secondes. Minutes. Une dizaine de tentative plus tard. Toujours personne. Je me rappelle que le SG avait annoncé aller à Toussus. On devrait donc avoir sensiblement la même route. Je me propose donc de faire un relais au cas où il aurait un problème d'émission. Sait-on jamais. Je suis dispo. Rennes accepte, mais c'est sans succès. Il ne réponds toujours pas.

Rennes ? Si on peut aider, faites nous signe on est dispo.
Quelques minutes plus tard, alors que Rennes Info réitère ses appels, on entends le SG répondre "Je vous entends maintenant !". Et je comprend "On a problème électrique". Immédiatement, le contrôleur leur indique l'azimut et distance du terrain le plus proche pour eux : Bagnoles-de-L'Orne. Je regarde aussi sur la carte déroulante de mon Skydemon. Mais le pilote du DA40 ne semble pas avoir l'intention de se dérouter et indique vouloir continuer vers Toussus. J'apprendrais plus tard en discutant avec Julien, pilote de DA40 que cette machine a un Fadec électrique régulant le mélange air+essence. Au delà des 20 minutes de l'autonomie d'une batterie de secours, il n'est pas bon être en l'air dans un DA40.

Les communications sont intermittentes avec le DA40. Le contrôleur réitére sa proposition du terrain de Bagnoles comme déroutement. A la radio, cela ressemble à une très forte suggestion. Enfin, je comprends que le pilote semble se dérouter.

Virage à droite, directe Bagnoles. Rien de plus facile avec une carte déroulante et une application de navigation

Encore un relais radio pour passer le numéro de téléphone de Rennes au pilote et c'est à mon tour de faire route vers Bagnoles. Rennes vient de me demander, si j'avais assez de pétrole, pour aller faire la verticale et m'assurer que tout le monde est au sol. C'est pas loin, pratiquement sur ma route et j'ai + de 4h00 d'autonomie pour 1 heure de vol restant. C'est donc sans hésiter que je file vers la verticale où je verrais le Diamond DA40 dégager et rouler au parking :

Verticale Bagnoles-de-L'Orne. Je vois le DA40 au parking. C'est bien lui.
Alors que j'en informe le contrôleur de Rennes, il me confirme avoir eu aussi des nouvelles par l'aéroclub de la machine. Tout va bien. Tout cela est finalement un non-incident comme il en arrive certainement tous les week-end sur les fréquences. Et c'est tant mieux comme ça. "Vaut mieux être au sol et regretter d'être en l'air que l'inverse" comme dit le proverbe. J'espère que c'est ce que ce dit le cdb du DA40.

Je ne sais pas ce qu'il est advenu du DA40. Est-il encore à Bagnoles ? Est-il reparti ? N'était-ce rien du tout ? La leçon de ce non-événement est qu'il est toujours aussi difficile visiblement de prendre la décision de se dérouter. On a envie d'arriver. C'est classique. Mais plus que tout, je retiens qu'être en contact avec des professionnels est très estimables. Eux, ont de l'expérience et grâce à deux ou trois suggestions bien appuyées à la radio, je pense sincèrement que la décision a changé dans le Diamond. Et parce que je n'étais pas dans l'avion et que je n'ai pas d'expérience de DA40, de l'extérieur et de 3'500 ft dans mon Robin, je pense que c'était la bonne décision.


Il reste enfin un mystère. Pourquoi donc Rennes Info me demande-t-il s'il y a un instructeur à bord ? Ce n'est pas moi qui suis en déroutement ?! #TraumatismeLasVegas #ClasseBravoSansInstructeur #DepuisCaVaMieux #VegasJySuisRetourné


Alors forcément, vous me voyez venir. Je ne peux m'empêcher de penser à cette vidéo d'un Farwest de 2008 ou 2009 où je me suis un peu raté dans la classe Bravo de Las Vegas. Et le contrôleur de me demander énergiquement "Is there an instructor on board ?!"



Mise à jour du 16 juillet. Grâce à la tour de Brest (Merci Julien !), je suis entré en contact téléphonique avec le contrôleur de Rennes Info. Et nous avons échangé longuement sur plein de sujets passionnants qui concernent pilotes et contrôleurs. Il m'a expliqué le pourquoi de la demande "Il y a un instructeur à bord". Bien sûr, il ne connaissait pas le contexte de mon épisode dans la classe Bravo de Vegas ;) Au final, la raison est tout simple lorsqu'on prends la peine de se mettre à la place du contrôleur : savoir qu'un instructeur est à bord va rendre plus simples et plus environnées les demandes que l'ATC va faire à l'avion qui peut aider. Bien sûr, dans mon cas, j'avais de mon initiative proposé de faire un relais radio. Ensuite, c'est le contrôleur qui, après vérification de mon autonomie, avait demandé à ce que je fasse la verticale. Mais de sa tour/centre de contrôle, comme s'assurer que cette demande ne va pas surcharger le pilote ? Qu'elle est compatible avec ce que sais ou peut faire le pilote aux commandes ? Que justement, on ne vas pas rajouter un problème par dessus un autre problème ? Il n'est pas inhabituel que lorsque c'est le contrôleur qui demande, le pilote n'ose pas dire non. Et un simple écart de route pourrait par exemple perturber un élève en solo. Et on a déjà un problème avec l'autre avion ;)

Mise à jour du 7 août. Je suis passé par Rennes pour saluer Ludovic, le contrôleur de cette anecdote ! Un très agréable moment à discuter de la même passion qui nous anime : l'aviation. C'est toujours très enrichissant de voir l'envers du décor ou l'autre côté du micro. Merci Ludovic pour ton accueil !





5 commentaires:

  1. Je pense que dans l’inconscient collectif, l'instructeur est meilleur qu'un "pilote lambda" (et le lambda peut être un BB, un PPL, un CPL, un ATPL, ... pour nos petits avions).
    Dès que l'ATC demande quelques chose de non standard à un pilote, il doit aussi se dire que si ensuite y'a un problème il pourra être tenu responsable. Donc il doit se dire que si y'a un FI à bord, il ferra bien (ou mieux).
    Mais l'inconscient collectif n'a pas tout le temps raison !

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  2. Si j'étais à l'autre bout du fil, je penserais la même chose !

    L'ATC ne peut pas savoir que je suis traumatisé par les "Is there an instructor on board ?" ;)

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  3. A mon avis c'est tout simplement un contrôleur taquin qui t'a reconnu ( un avion Fox qui fait la radio en anglais correctement dans le nord de la France ben c'est forcement toi !).

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  4. Merci pour ce témoignage qui démontre une fois encore l'importance d'être en contact avec l'ATC, qu'on soit en classe G ou pas ne change rien (ou pas grand chose) à la plus-value. D'autant que la France est un pays ou l'ATC est particulièrement serviable et efficace, comparé à d'autres. Merci à eux!! Enfin, faire du relais (parfois même en y intégrant la traduction simultanée UK/FR) est un plus pour chacun, y compris pour les militaires de Poker 24 à 26 qui, ce 13 juillet en volant à 700 pieds QNH, avaient du mal à se faire entendre de Paris Info... ils se reconnaîtront :=)

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  5. La version TDI du DA40 est en effet totalement dépendante des batteries de secours.
    En cas de panne d'alternateur, l'autonomie garantie est de 30 minutes minimum. Après ce délai, le moteur s'arrêtera dès que la batterie backup est épuisée.
    Le circuit électrique du DA40 TDI est complexe avec 3 batteries : La principale pour alimenter les équipements, une backup pour alimenter les ECU (Engine Control Unit) et garantir que le moteur continue à tourner en cas de panne d'alternateur, une troisième pour fournir le courant minimum nécessaire au fonctionnement de l'alternateur en cas de panne de la batterie principale.

    En cas de problème électrique à bord d'un DA40 TDI, le stress monte donc rapidement.

    Cette explication n'est valable que pour le DA40 TDI, version très répandue en Europe.

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