23.9.06

"And you... you were the ATC ?"

- "Et si on allait s'entraîner à la phraséo anglaise ? Ca te dit ?"
C'est par cette question que Joël m'a invité. Comment résister à cette proposition ? Travailler la phraséo ? Si je suis partant ? Mais je suis déjà parti ! C'est quand ? C'est quand ?
- "Et pas en France, hein... trop facile..."
Trop facile... hum... La destination est donc choisie à 1h30 de vol de Toussus. Des îles anglaises feront parfaitement l'affaire. On imprime les cartes, la météo...


... tout semble bien se préparer. Alderney est proche de la côte. Même pas 1h30 avec le PA-32 de Joël. Rapide. Propre. Puis on attrape les NOTAMS et boum.. "et là c'est le drâme". Une course aérienne a lieu ce week-end à Alderney. Justement celui-là. Je vais une fois dans ma vie à Alderney et pile-poil le jour où je veux y aller, le terrain est fermé pour cause de "Alderney Air Race". Changement de programme. Pas grave. On choisi l'île d'en-dessous : Gernsey.

A peine arrivé à Toussus, lorsque je gare la voiture sur le parking, un bruit ou plutôt un sifflement attire mon attention. Une turbine ! Et pas une turbine d'hélico (classique à Toussus, en tout cas plus qu'à St-Cyr)... une turbine d'avion ! Je file devant le hangar FARMAN. J'ai à peine le temps de sortir l'appareil photo.

Un splendide Pilatus PC12...


... sur le parking Farman de Toussus


LX-LAB Design by Starck...




... c'est marqué dessus.


Attention je vais démarrer !


Patrick me raconte, alors qu’il écoutait la fréquence tour de Toussus, qu’il a entendu le PC-12 demander qu’un taxi les attende à la descente d’avion. Faudra que je pense à faire ça à St-Cyr. Les passagers du PC-12 auront leur taxi, au pied de la passerelle, grandes portes ouvertes. Genève - Toussus, puis Versailles en taxi. Sympathique samedi pour les passagers ? Nous discuterons quelques minutes avec l’équipage qui nous fera visiter leur appareil, le cuir des fauteuils et l’exigu poste de pilotage. Pressurisé, dégivré, niveau 280, 230 kts en croisière. Des valeurs qui nous font rêver.

La traversée de ROZEL vers Novembre-Echo vu par Google-Earth


Notre vol vers Guernsey est splendide avec cette courte traversée maritime. La météo devient CAVOK. Le PA-32 vole droite et sereinement. Joël a préparé le briefing pour l'arrivée. L'enchaînement des fréquences, le cheminement et en fonction du vent la piste probable. Le point Novembre-Echo, l'extrémité du cheminement obligatoire pour la traversée est identifiée et visualisée. Nous sommes prêts à affronter la phraséo anglaise alors que je vérifie que le gilet de sauvetage est à portée de main sous les moqueries du reste de l'équipage. Après le gilet, j'en aurais pour mon grade avec le HiViz Jacket ;-)

Révision de dernière minute ;-)


Après avoir passé Caen


Notre arrivée et le départ à Gernsey


"HiViz Jackets are mandatory" sur les terrains UK
On ne se moque pas !


Auto-dérision


Les formalités de douane et d'arrivée sont remplies. Notre anglais est mis à rude épreuve par la personne qui nous accueille derrière son bureau. Après l'explication de quelques minutes sur les horaires de bus, les numéros de taxi et tout plein d'autres choses... nous nous regardons tous les trois : "Rien compris". Tant pis, nous remercions ce monsieur après nous avoir assuré qu'on avait rempli tous les formulaires. Sauf qu’une fois au pied de la tour, nous sommes perdus. Où est la sortie ? Un labyrinthe ce terrain. Des barrières, des barbelés, des panneaux interdisant cei ou cela, mais pas de sortie visible. Pas une flèche. Pas une indication. Rien de conviviale. Nous revenons sur nos pas. Je croise alors une femme sortant du bâtiment et se dirigeant vers le parking.

- "Hum... Sorry, do you know where is the exit around there ?"

J'ai l'air ridicule, mais par chance, après quelques échanges sur la pertinence de prendre le bus ou un taxi, cette charmante personne accepte de nous emmener en ville avec sa voiture ! On se croirait dans la "Chasse au Trésor". Et nous voilà à trois dans une sorte de... une... une petite voiture bleue avec le volant à droite.

- "And… you were in the November-Charlie-Hotel ?" me demande-t-elle
- "???? Yeeeeees ! And you... You were the ATC ???? At the tower ???"
- "Yeeeeeees ! It was me !"

Si ça ce n'est pas de la chance. Nous avons été accueillis sur la fréquence tour par une charmante dame qui prend sa voiture pour nous amener à Saint Peter Port (la ville principale de Guernsey). L'accueil est surprenant ! Ils font ça pour tous les équipages ? ;-))

Déjeuner sur le port au soleil !


Après un déjeuner très aéro et une petite promenade à Saint Peter Port au soleil, il faut remonter au terrain. Hop dans le bus 7 (ou 7A ?) pour une petite promenade de l’île de 20 minutes. Arrivée au terrain, nous montons au bureau de piste pour attraper une météo et vérifié que le plan de vol est arrivé. Patrick s'y colle et avale la documentation du terminal météo... préhistorique. Nous retrouvons un second préposé derrière son bureau qui nous refuse la montée à la tour avec un sourire et un jolie « NON ». Bon. Tant pis.

10 PRINT METAR 20 GOTO 10


De retour sur le parking, de biens belles machines sont stationnées et nous ne résistons pas à aller faire un petit tour (oui, j'avais le hiviz machin truc) pendant que des Trilander, ATR et autres BA-146 décollent ou atterrissent.

Lancair Columbia 400




Cirrus SR22 même pas GTS...
... et même pas Turbo ;-))


Le N742CH parké au West Grass Parking de Gernsey


La trace sur la 1:500 000 du SIA


Le port de Saint Peter Port en montée initiale 09


Trois passionnés d'avion dans un PA-32
Grands sourires à bord...


... et le contre champs.


Verticale Caen-Carpiquet pour le retour


 


1,2, 3 GPS.... 4 avec le mien à l'arrière !

Il y a du monde à Toussus. Fin de samedi ensoleillé, nuages et pluies qui arrivent font que le tour de piste est encombré. Ca se bouscule. Les trollers de Toussus sont efficaces. Nous passons HOL lorsque nous demandons une directe 07 "si c'est possible". Malheureusement trop de monde, alors la tour de Toussus nous envoi vers RBT puis Sierra. Le classique. Au moins cela fera une jolie trace GPS.

Jolie arabesque pour l'arrivée à Toussus


En finale 07L à Toussus


Priorité à droite

19.9.06

Fin de week-end

Fin de week-end. La brume et ce voile nuageux ne se sont pas levés du week-end. Et pourtant les METAR et TAF étaient optimistes. Trop, malheureusement. Nous attendons 18h00, puis 18h30 ce dimanche pour enfin nous glisser dans les cockpits des DR221. "Les" ? Pourquoi "Les" cockpits. Chacun le sien. Pas de jaloux. Patrick et moi avons chacun notre DR221 pour cet - écourté - vol local "sortie ouest".




Patrick et son ami Olivier sont dans le Zulu-Uniform. Je suis à bord du Kilo-Hotel. Nous prévoyons un petit touché sur Toussus, juste comme ça pour voir, pour se promener en cette fin de week-end. Un NOTAM plus tard, nous repartirons sans être passé par SIERRA. Un petit tour et puis s'en vont. Ce fut néanmoins un bon entraînement. 4 kilo de vizi pour les pilotaillons que nous sommes, c'est très peu. Et autant s'entraîner lorsqu'on le choisi et pas lorsqu'on le subit.

La trace d'un des deux appareils


Même à quelques minutes d'écart, il est étonnant de voir après coup par où nous sommes passés. Même si on s'est retrouvé sur 123.45, nous ne nous sommes jamais vu. Patrick m'a aperçu au sud des antennes de Mantes, lorsque j'ai fait un 360 pour l'attendre, mais sinon la vizi n'était vraiment pas compatible avec un petit vol un tant soit peu rapproché.

Les deux traces GPS vues par Google


Pour ne pas déroger à la règle, je continu à demander :

- "St-Cyr ? On peut faire la radio en anglais pour entraînement ?"
- "Pas de problème, Kilo-Hotel"

On est pas lundi sur IVAO, mais tant pis. La fréquence est chargée avec 3 ou 4 appareils dans le petit circuit de St-Cyr. C'est justement dans des situations où le temps presse, où d'autres pilotes attendent la libération de la fréquence que je dois m'entraîner alors même si j'aurais pu me dire "trop de monde, je vais foutre ma m****, alors faisons la en français", j'ai persisté et bien m'en a pris.

En revenant par le secteur nord ("thirtyyyyyyyyyy second from north sector") je me suis même gouré d'indicatif. Au lieu de m'annoncer en Kilo-Hotel, j'ai pris l'indicatif de l'autre DR221 (Zulu-Uniform). Comme j'étais le seul à faire la radio en anglais au départ, c'est le contrôleur qui m'a repris ("You're not Kilo-Hotel ?"). La honte.

Vous auriez dû être là sur la fréquence pour m'entendre prononcer :

- "Taxing to The Alcyons Apron, Kilo-Hotel"

"The Alcyons" à la sauce anglaise, prononcé par moi, après un retour de local, dans un DR221 à St-Cyr, ça vaut son pesant de choucroute.

10.9.06

Report abeam west to cross the axes

Les vacances sont finies ! Oubliés les passages bas sur SABA, les touchés sur la 09 de Juliana et les tours de piste à St-Barth. Revenons à nos décors métropolitains et notre "ouest parisien". Il faut maintenant aller voir pour-de-vrai à quoi ressemble cette "entrée ouest expérimentale" que je décryptais dans ce message. Il faut suivre la N12 ? Alors suivons les voitures !

Pendant la prévol, inspection des pneus neufs


Je reprends mes bonnes habitudes. Mon habitude s'appelle DR-400 120 chevaux F-BTKU. En fait, c'est plutôt moi qui l'attends. Alors en patientant, je file à la pompe, monte sur l'échelle (utile pour les Cessna) et shoot tout ce qui passe.

Robinson R44 Raven II

Robin HR200

Cap 10C




Le KU arrive enfin. Je commençais à cramer au soleil ;-) J'ai tout préparé : NOTAM et extrait du journal officiel. Et pourtant une fois en l'air tout cela est bien loin. Je révise tranquillement les caractéristiques du DR400-120. Mes derniers vols remontent à... loin.



Je prévois de partir vers l'ouest et d'aller toucher à Toussus s'il n'y a pas trop de monde. Pontoise est fermé pour cause de meeting aérien.

Le départ est sans problème. En sortant par l'ouest, je tente déjà de repérer les points A et B indiqués sur le décret du JO. Je fais tout de même attention au fameux goulot d'étranglement juste avant de quitter la fréquence de la tour de St-Cyr. J'attrape comme d'habitude l'ATIS de Toussus. C'est la 07 en service. Assez rare pour moi. Cela m'incite à tenter d'y aller faire un touché.

En arrivant à RBT, la fréquence est très très occupée. Je tente néanmoins ma chance, mais sans illusion.

- "Toussus du Fox-Kilo-Uniform, bonjour !"
- "Kilo-Uniform, Toussus, je vous rappelle"

Bon. Et bien voilà. Ca, c'est fait. Je vais faire un tour au sud de RBT. Je me dis que verticale le VOR à 1500ft, ce n'est pas une bonne idée de trainer au milieu d'un carrefour.

Jolie cercle presque rond


Je fais un joli cercle dans le ciel. Ne manque plus que les fumigènes (et accessoirement de le faire dans le plan vertical). Me voilà de nouveau prêt à attraper la radiale 238 afin de trouver Sierra. Je tente un rappel dans un moment de calme et bien sûr marche sur les pieds d'un appareil IFR en final. Puis, quelques secondes plus tard, j'arrive à capter l'attention du contrôleur qui m'autorise à aller faire un touché chez lui. Sierra, la base, finale 07 gauche ("confirmez la 07 gauche ?") et me revoilà à la remise de gaz sur cette immense piste avec un train tricycle. En plus pas de vent. Que demande le peuple pour une séance de remise en main !

Je repars vers l'ouest à la recherche de mon entrée expérimentale. Pour corser le tout :

- "Saint-Cyr, Fox-Tango-Kilo-Uniform, good afternoon !"
- "Fox-Tango-Kilo-Uniform good afternoon !"
- "Ce serait possible pour un entrainement en anglais ?"
- "If you want"
- "Saint-Cyr, Fox-Tango-Kilo-Uniform, D-R-Four-Hundred back from local... flight, 1 minutes from west sector with information Echo"
- "Fox-Tango-Kilo-Uniform, to join right hand downwind three-zero, report abeam west to cross axes"
- "hum... will report abeam west before crossing the axes, Fox-Tango-Kilo-Uniform"

A gauche la sortie, à droite l'entrée expérimentale
et au fond St-Cyr

La même chose vue d'en "haut" ;-)


Mis à part le suivi "à la voiture près" et cela dès le début de la N12, que je n'avais pas prévu sur mon tracé initial (voir ici) j'ai fait ce que j'avais imaginé. J'ai eut peur sur le chemin "aller" d'aller trop loin vers l'est et de ne pas trouver les deux intersections de routes (A & B). Tout compte fait, à 1500ft, on les voit bien et surtout on comprend vite quand il faut tourner à gauche.



Allez hop. Je pense avoir compris.

30.8.06

St-Martin 2006

Après les récits des vols sur les îles de St-Martin, Saba et St-Barth, il me restait à réaliser un montage des bouts de vidéo que j'ai ramenés de l'autre côté de l'Atlantique. Le petit appareil photo numérique qui permet d'agrémenter de photos les messages de ce blog, a aussi une fonction vidéo. Ouf, on va pouvoir regarder les gros navions atterrir sur la 09 de Princess Juliana, se poser comme en vrai à Grand-Case et - cerise sur le gâteau - faire un touché à St-Barth. Assis en place gauche, à bord d'un petit Cessna 150. Bienvenue à bord.

29.8.06

St-Barth, on quitte vers Grand-Case… j’espère à l’année prochaine… Novembre 704

Le vol Air France AF489 à destination de Paris Charles-De-Gaulle est prévu, demain vendredi. Les valises ont été ressorties. Les affaires regroupées. Je regarde les photos. Saba, Maho, St-Barth, Grand-Case, Juliana défilent. Les bleus des lagons, les nuages qui flottent au dessus des îles et le turquoise de la mer des Caraïbes. Je ne peux me contenter de repartir déjà. J’ai rappelé Frank pour prévoir un dernier vol.



Mercredi. Un voile de sable rempli tout le ciel de St-Martin. Depuis la plage d’Orient Bay, on devine l’île de Tintamarre comme noyée sous un nuage de pluie. Je cherche à deviner les contours des nuages dans le ciel. L’ambiance reste néanmoins très lumineuse. C’est une agréable journée. J’arrive à l’aéroclub en avance. Frank revient d’un vol. « Il fait tout bizarre, vent de sable, une fois en l’air on n’aperçoit même pas Tintamarre ! ». C’est bien la première fois que j’annule un vol à St-Martin.

Jeudi. Veille du départ. Rendez-vous est pris en fin d’après-midi. Tant mieux, cela me donnera une autre lumière. Je n'ai jusqu'alors volé qu'en fin de matinée. Le voile de sable est toujours là. Etonnant. Je retrouve une fine pellicule de sable très claire sur tous les bords d’attaques du N66704.

- « Allez, c’est toi qui bosse ! »

Je m’exécute. Je prends le petit escabeau toujours placé à l’arrière du Cessna 2 places. J’ouvre le bouchon d’essence du réservoir de l’aile gauche et plante la pipette graduée.

- « 5,5 gallons à gauche, chef ! »
- « Et l’autre ? »

Je redescends de mon escabeau, fait le tour de l’avion avec mon petit matériel et procède au même cérémonial.

- « 5 gallons dans celui-là, chef ! »
- « C’est bon, redescend ! »

10,5 gallons. Un peu plus d’une heure et demie à 6 gallons de conso/heure. Un chouya juste. C’est parti pour apporter l’avion à la pompe à roulette. Mine de rien, ça me change des Robins avec leur carnet à inspecter (combien d’essence reste-t-il dans celui ? Il a volé combien de temps ? De quand date le dernier avitaillement ?) et les avions à « descendre » (au moteur) pour leur faire le plein à la pompe de St-Cyr. Ce sont les vacances et ces modestes changements sont autant de nouvelles choses à découvrir pour le pilotaillon que je suis.

Je finis la prévol, le mémento/checklist à la main comme à mes premières heures de vol. J’inspecte l’avion tout en métal, moi qui ne suis habitué qu’au bois et à la toile et aux ailes basses.

Nous embarquons enfin. L’instructeur, Frank, à droite. Le pilotaillon/touriste à gauche.

- « Alors, on va où ? Il veut aller où le parisien ? »
- « On pourrait se faire St-Barth ? J’aimerais bien faire des photos et des vidéos »
- « C’est parti, tu fais la radio ? »
- « Soyons fou »

Les pédales de frein sur appuyés pendant que je tire la manette de frein de park. Mise en route. Alternateur sur ON… 1000 tours.

- « Grand-Case Info, Novembre 704, bonjour ! »
- « Novembre 704, Grand-Case, bonjour ! »
- « Grand-Case Info, Novembre 6-6-704, Cessna 150 au parking, pour un vol d’entraînement vers St-Barth et retour »
- « Novembre 704, QNH 1014, vent du 100 pour 15 kts rafales 19 kts, par de trafic connu dans le circuit »
- « 1014, on roule pour Alpha, Novembre 704 »

Lâcher le frein de parking (les deux pieds sur les pédales du haut), un peu de gaz, roulage pour Alpha, point fixe… et on se fait doubler par un Baron-five-eight-phraséo-in-ingliche qui décolle comme une fusée rentrant les trains à peine le sol quitté et avalant la piste en radada.

- « Backtracking runway 12, November-Seven-Zero-Four »
- « Roger »

J’oublie les actions vitales à l’alignement et je mets les gaz me méfiant, cette fois-ci, du vent « de travers » (un p’tit 30 degrés) et du message de l’AFIS (13 kts, rafale 18 kts). Montée initiale aux 70mph, balloté par le vent et les rabattants de la montée initiale de Grand-Case. Je surveille d’un bout de l’œil la bille. Trop sensible au pied… trop violent ce pilote… La baie orientale est passée lorsque je lève le nez pour voir l’horizon (et pas l’inverse, comprenne qui pourra). Il n’y en a pas. Le voile de sable est là et masque un peu la visibilité. Je ne vois même pas St-Barth (ouf, je trouve Tintamarre).

- « C’est par où ? » (question du pilotaillon parisien de base perdu dans les iles)
- « Je dirais un 150 et 1500ft » (réponse de l’instructeur jouant dans son jardin)
- « 150 ? 150 ! 1500ft ? Ah oui, de Grand-Case vers St-Barth c’est 1500ft… par contre le retour c’est 1000ft, c’est ça ? »
- « Tout à fait ».

Comme si j’allais le refaire tout seul le lendemain. Bon, ok pas le lendemain, mais le surlendemain et avec Flight Simulator. 5 minutes plus tard, moment choisi dans le cockpit :

- « Moi, je vois St-Barth et l’ile Fourchue » (affirmation de l’instructeur qui, même les yeux fermés, voit tout)
- « Hein ? Je vois que dalle » (réponse de l’élève perdu)
- « Moi, je dirais au 155 plutôt que 150 » (précision suisse aux 5 degrés près)
- « Bon, baaaa 5 degrés à droite… je vois toujours rien, mouaaa » (l’élève qui a l’impression de ne pas être dans le même avion que l’instructeur)

Je me retourne et refais le coup de la planchette et de la VAC de St-Barth. Cette fois-ci, on arrive de Grand-Case par le nord ouest (la dernière fois, on arrivait de Saba). Je sors la VAC de TFFJ, toute belle, imprimée de Paris. Et j’essaie de recoller les morceaux. L’ile Fourchue apparaît (ou plutôt un bout de terre semble apparaître au loin).

- « Bon… là c’est Fourchue… ah on voit St-Barth derrière… » (l’élève content de comprendre un minimum ce qui se passe devant lui)
- « Ok. Tu vois le Pain de Sucre ? » (l’instructeur 10 minutes devant l’avion)
- « Hum » (l’élève essoufflé, 10 minutes derrière l’avion)

- « Tiens ton avion à 1500ft et ne passe pas à gauche du Pain de Sucre »

Je replonge dans la VAC pour tenter de calquer ce qui se déroule sous mes yeux avec la petite représentation du SIA que je pose sur le volant du Cessna.

- « Range moi ce truc et regarde devant toi ! » (l’instructeur énervé)

Je jette la VAC sur la casquette et met le nez dehors. Fourchue est là… derrière le petit ilot c’est le Pain de Sucre qui marque le début de la finale. Le terrain est juste à gauche. St-Barth et Gustavia sont maintenant bien visibles. Mon paradis de pilotaillon est posé devant moi. Il reste à jouer.

- « Tu fais toujours la radio ? »
- « Ah baaaa… ouaaiiiis »
- « Alors vas-y, appelle-les… n’oublis pas qu’on vient de Grand-Case »
- « Yop… yop… C’est comment qu’ils s’appellent déjà ? »

Dans ma tête, tout se bouscule… Gustavia ? St-Barth ? St-Barthelemy ? St-Barth Info ? Gustavia Info ? La terre ?

- « St-Barth Info, Novembre-704, bonjour ! »
- « Novembre 704 bonjour »
- « St-Barth Info, Novembre 6-6-704, Cessna 150, en provenance de Grand-Case pour un touché sur vos installations, 1500ft et travers Fourchue dans 3 minutes »
- « Novembre 6-6-704, QNH 1014, vent du 80 pour 14 kts, rafale 20 kts, pas de trafic connu »
- « 1014, 704 »

Des messages comme ça, on n’en passe pas tous les jours. En tout cas, pas moi (Frank à droite, si). Alors dans l’euphorie et le manque de pratique des AFIS, j’en oublie de dire quand je prévois de rappeler « Passant Pain de Sucre, pour la finale 10 ». Tant pis. J’suis parisien.

J’arrive forcément en vrac au dessus du Pain de Sucre. Forcément, j’ai l’excuse d’être en vacances. J’en oublie même de tourner à gauche pour attraper l’axe de la piste de TFFJ. Si Frank ne m’avait rappelé à l’ordre… On serait à Saba à l’heure qu’il est. Je suis absorbé par le paysage. La mer des Caraïbes. Le bleu. Les bleux et St-Barth devant.

Je tiens comme je peux les 1500ft et attrape enfin l’axe… légèrement à droite. Je me fais réexpliquer la technique d’approche sur St-Barth. Les chiffres « 10 » et « les plots » deux doigts au dessus du raz du col de la tourmente avec sa nouvelle route (ils m’ont tout changé depuis l’année dernière !). La vitesse, pas moins de 70mph et l’assiette à piquer « assez prononcée ». Ne pas oublier les volets, sinon « ça ne va pas le faire ». Avec tout ça, tu te débrouilles. La piste est là, la main gauche sur le volant, la main droite sur les gaz et c’est partie pour un touché.

J’ai beau me concentrer et tenter d'en profiter, mais je suis horriblement crispé sur le volant du Cessna. Tout à l’heure, je lâcherais un peu la branche gauche du volant pour me rendre compte que j'y suis totalement agrippé. Trempé de sueur.

- « Ne pique pas du nez… ta vitesse… ne remonte pas… »

Je suis derrière l’avion. Ca a beau être un avion de débutant et lent, je suis derrière l’avion. J’ai l’impression de piquer sur la 10 et je n’arrive plus à gérer correctement la relation « assiette – puissance – vitesse ». Tout s’enchaîne trop vite. Lorsque je suis content de mon plan (le « 10 » est bien posé deux doigts au dessus du col), c’est la vitesse qui ne va plus. Lorsque je tiens mon bon 75mph, je suis beaucoup trop haut. Et ce jeu dure tout le temps de la finale. Cela me paraît une éternité. Je « pilote » mon Cessna 150 en finale sur la 10 de St-Barth. Allons-y !

Le col pass, trop vite, trop bas ou trop haut… La piste est là, à peine à 50 mètres. « Ne plonge pas » conseil Franck. J’ai l’impression d’avoir des yeux de mouche. J’essaie de capter toutes les images et les impressions à 180 degrés. Le parking aviation générale, cet hélico parqué à gauche, un Dornier remonte au parking à droite, la plage au bout de la 10, 2 puis 3 windsurfeurs avec de grandes voiles, ça doit bien être de 7m2… ils filent… mais on s’en fout de ces voiles !! Concentre-toi sur la piste !

Le vent et les turbulences sont aussi de la partie. C’était trop simple. Nous sommes parfois secoués à droite puis à gauche… puis soudain, c’est calme… L’avion descend tout seul (et ce n’est pas grâce au trim que je n’ai pas réglé), puis de nouveau un grand coup qui nous enfonce sur le plan. Il faut se battre.

Je passe les plots. Plein réduit. Je n’ai pas regardé la vitesse, mais ça ne devait pas être ça (du tout). Je suis en « mode arrondi »… Laisser l’avion se faire la piste… Se battre pour le laisser à plat sur la piste et pas 10 mètres à droite comme le vent semble vouloir le faire. Je me bat. Ca secoue. L’effet de sol ou le vent semble me faire refuser la piste… on est un chouya long me semble-t-il (frank me dira plus tard qu’on avait le temps de faire le touché)… Ca touche… On est posé… Je laisse rouler jusqu'en bout de bande. Jusqu'à la plage.

Bien sûr, Frank a fait plus que m’aider, mais il m’a laissé l’impression que je posais le petit Cessna, à moi tout seul. Sur la 10 de St-Barth. Nous roulons jusqu’à l’extrémité, puis nous remontons. Nous voilà posé à St-Barth. J'étais assis à gauche. Je suis exténué, en sueur et le t-shirt trempé.

Je suis scrupuleusement la ligne jaune alors que nous longeons le terminal en remontant le terrain. Un Caravan, un Dornier et un TwinOtter. Certains embarquent des passagers. Alpha approche. Frank déroule la check pour nous faire gagner du temps. Message à la radio :

- "Pour le trafic en finale, on a le temps de s'aligner et de décoller du November-704 ?"
- "Oh oui, ça passe... on est pas encore en finale"

Je m’aligne et je décolle avant que le trafic commercial ne déboule. Plein gaz. Au bout la plage. Le Cessna accélère lentement. Le terminal défile à droite. Je garde l'axe au pied et les planches à voile se rapprochent. Je peux maintenant distinguer la marque des voiles. "Tiens un Neil Pryde v8 !".

65mph, je tire le manche vers moi. On accélère doucement,nous survolons la plage en montant tranquillement. Nous sommes au dessus de la mer. La baie de St-Jean. Et j'entame mon virage en montant vers la gauche pour rejoindre le circuit.

Frank me raconte une plaisanterie. Il est dans son jardin. C'est chez lui, c'est son espace de jeux. Moi, je tâche de regarder partout tentant de capter toutes les images possibles afin d'en faire des souvenirs. Je ne veux rien manquer.

- "On fait quoi ?"
- "Bha, un autre tour !"

Et c'est reparti. Seconde présentation sur la 10 de St-Barth. Seconde attaque en piquée et le passage au raz du col et de la route. Lorsque je pense qu'il y a peu, un pilote (ou plutôt son avion) a touché le toit d'une voiture qui montait par là.

Touché. Remise de gaz et je prend petite assiette à cabrer avant de prendre à gauche. Je laisse Frank piloter et annonce "les commandes à droite" car je veux faire un film. Je n'arrive déjà pas à piloter en ne faisant que cela, alors filmer et piloter... Le troisième tour cela celui de Frank.

- "Tiens, c'est marrant, ça fait un baille que je n'ai pas atteri à St-Barth avec le C150".

16h00. Demain à la même heure, je serais dans un Airbus A340 au départ en direction vers Paris. Pour l'instant, le Cessna 150 est en vent arrière de la 10 à St-Barth et je n'ai pas envie de rentrer. 3 semaines se terminent. Les commandes sont repassées à gauche et je prend un cap vers St-Martin. Je quitte l'air de jeux. Un dernier atterrissage sur la 12 de Grand-Case me laisse plein de regrets. J'en aurais bien profiter. Mais mon coffre à jouet se referme. En quittant le circuit de St-Barth, j'ai annoncé sur la fréquence :

- "St-Barth, on quitte vers Grand-Case… j’espère à l’année prochaine… Novembre 704"



La vidéo de ces tours de piste (et bien d'autres) est disponible ici.
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