C'est une histoire qui commence en 2003, celle d'un pilote de simulateur de vol sur PC qui passe son brevet de pilote (PPL) et qui remplit sa boite à souvenirs.
Les trois avions sont sagement stationnés les uns à côté des autres sur le parking ensoleillé de Mojave. Nous prenons le temps de nous photographier tous les 6 près des avions. La tour affiche toujours un insolent "Air and Space port" (voir ce récit). Nous, nous sommes fiers aussi d'être déjà arrivés jusque là. C'est mon 6ème jour aux Etats-Unis, il faut parfois faire un "stop" pour nous rendre compte du chemin parcouru. Nous avons déjà parcouru plus de 2200 nm (plus de 4100 km). Ce n'est pas fini et j'ai déjà l'impression d'avoir fait un nombre incroyable de vols exceptionnels. On pourrait s'arrêter là.
Jusqu'alors, chaque soir, c'est à peu près le même cérémonial. Nous prenons possession de nos chambres. Nous y jetons nos affaires, puis nous cherchons un endroit pour diner. Nous discutons alors de la navigation du lendemain et des émotions de la journée écoulée. Puis, épuisés généralement aux alentours de 1h00 du matin, nous nous regroupons dans l'une de nos chambres d'hôtel, déplions les cartes et autres AFD, sortons les log de Nav. des Alcyons et saisissons frénétiquement dans le GPS 496 les points de route. Tout cela se fait encadré par maître Marc-Olivier. Il semble connaitre comme sa poche tous les coins où nous allons. C'est à se demander parfois s'il n'a pas lui-même défini la forme des classes Bravo, MOA et bouts de classe d'espace qui trainent. Il nous est même arrivé un soir, ce devait être vers 02h00 du matin, d'être dans sa chambre tels des petits paddawan préparant notre nav. Il était assoupi, effondré sur son lit. Oui, il ronflait ! Mais par intermittence, au gré de nos remarques à haute voix sur le choix de tels ou tels VOR, route ou altitude, il nous répondait plongé dans un demi-sommeil : "passez plutôt par le VOR Mickey" ou "Prenez 4500 ft parce que sinon vous allez 5 nm plus tard, croiser la MOA bidule qui à l'heure estimée où vous passerez pourrait être active, car le contrôleur en place aura fini son pot d'anniversaire ce jour là". Bluffant. Il fallait être dans la chambre, là. Je suis sûr que vous ne me croyiez pas.
Le Tango-Bravo au roulage à Mojave
Après avoir plus ou moins bien préparé la navigation du lendemain (l'expression "à l'arrache" reviendra souvent), il restait à Florent et moi à trier les photos et vidéos de la journée passée. Faisons de la place sur les cartes mémoires ! Il s'en suivait alors l'opération : "Je branche tout mon bordel électronique" (un portable Pc, un eePC, des chargeurs de batteries, un disque dur externe, des lecteurs de cartes mémoire) puis à lancer les différents transferts et à revivre dans un état comateux (réveillé en moyenne depuis 12 à 14h) au travers de photos et vidéos les moments forts de la journée. On était pas couché. Par contre, pas de difficulté pour trouver le sommeil. Les rêves en plus.
Dans la montée initiale de Mojave le stockage de liners
Les batteries sont donc chargées et les cartes mémoires vides. Le log de nav. est encore affiné avec les dernières recommandations de Marc-Olivier. Il fait vraiment chaud sur Mojave. Il est temps de faire tourner le gros ventilateur à l'avant.
Tout autour de nous, le désert de Mojave. Notre route doit nous conduire encore plus à l'est vers Las Vegas. Le prochain stop est McCarran, KLAS, aéroport international. 160 nautiques (environ 300 km) à vol d'oiseau puisque les oiseaux eux, peuvent passer au dessus des espaces restricted (R-2515, R-2524, R-2502N). Nous non, sauf lorsqu'on s'appelle Marc-Olivier et qu'on négocie gentiment avec le contrôleur une verticale d'Edwards AFB. Entre Mojave et Las Vegas, on trouve cette fameuse base militaire. Rien que ça.
La trace GPS du départ de Mojave cap au sud puis au feu à gauche
Je m'assois donc à gauche et sans surprise nous voilà déjà en l'air, en route vers Las Vegas. On voit déjà le soleil décliner nous offrant une superbe lumière rasante. Le reste du vol promet beaucoup. Le Seven-Five-Foxtrot est le dernier à partir. Devant nous, le Duchess est déjà loin et le Cessna Tango-Bravo vient de décoller. Quelques minutes après l'envol, sur 123.45, Marc-Olivier nous prévient qu'il a réussi à négocier pour le Duchess une verticale d'Edwards. On entend l'enthousiasme dans sa voix et presque le bruit de l'appareil numérique de Christophe qui s'échauffe. Ce qui n'était qu'une indication se transforme en une invitation pour le Tango-Bravo qui semble filer tout droit. Cela réveille énergiquement le contrôleur qui rappelle clairement qu'il faut passer par le VOR de DAGGETT (clin d'oeil à mon premier instructeur Xavier du même nom) parce que les zones sont HOT HOT ! Un point c'est tout. Et le ton utilisé est sans ambigüité. Alors que Florent et moi étions sagement sur notre trait, nous entendons le Tango-Bravo reprendre la route vers DAG.
Photo de la base militaire d'Edwards prise du Duchess avec la piste pour la navette spatiale
Nous contournons donc comme prévu les zones Restricted. Un gros pavé à éviter en plein milieu de la carte. Nous voilà au dessus du désert de Mojave. La luminosité est exceptionnelle et notre regard semble porter jusqu'à l'infini. Nous avons presque l'impression de pouvoir regarder "au-delà" du désert. Étonnement, j'aurais aimé être au sol pour voir ce décors d'en bas. Il faudra revenir. Sans nul doute.
160 nm, ça fait beaucoup de kilomètres de désert à parcourir. Mais nous ne trouvons pas le temps long. Nous en avons forcément plein les yeux et profitons pleinement. La radio nous occupe aussi un peu. 123.45 (the french touch) est là aussi pour nous accompagner et il faut préparer l'arrivée. Loin devant, mais à porté radio, Marc-Olivier nous tiens au courant de l'ATIS de Vegas. C'est Golf qui est "current". L'AFD est repéré aux pages de l'airport diagram de McCarran KLAS. Les cartes sont pliées dans le bon sens. On révise un peu, on se brief. La tension monte lentement.
Ca ressemble pas du tout à St-Cyr ! (Airport diagram de Las Vegas McCarran, KLAS)
Mais avant d'arriver sur McCarran, la nuit tombe et nous nous inquiétons d'un petit pic (Charleston peak) entre nous et Las Vegas. La lampe rouge du copilote et la frontal du pilote sont en place. Nous nous préparons à une arrivée de nuit. A la suite d'une petite discussion entre Florent et moi, nous changeons un peu notre stratégie d'arrivée en décidant de survoler l'autoroute I15 au lieu de tracer tout droit. Cela nous fait passer dans une petite vallée et assure notre arrivée à vue. Et "à vue", il y a des choses à voir. Un halo de lumière se présente au loin. Pas de doute, ça doit être par là !
Alors que nous nous rapprochons de Las Vegas, la fréquence est de plus en plus chargée. Nous passons de plus en plus rapidement d'une fréquence à une autre. D'un "center" à une "approach", puis une autre. Et nous nous retrouvons sur des fréquences où nous côtoyons des biens plus gros que nous et bien plus à l'aise en phraséo anglaise ! On se rend compte, tout doucement que l'on se rapproche du terrain au 609,472 mouvements par an , 6ième terrain des Etats-Unis (en 2007). Comment avons-nous pu partir aussi insouciant, nous avec notre maigre expérience et nos petits Cessna. Mais on sent déjà un moment exceptionnel. Nous avons juste peur de ne pas être à la hauteur. Et si on se faisait jeter ? Et si, le contrôleur, exténué par un "Say Again" de trop, nous envoyait patienter dans un coin. Et si, nous nous trompions complètement dans une clairance ? Une mauvaise compréhension, la descente rapide au lieu d'une montée, un virage dans un sens au lieu de l'autre. Seul le traumatisme de ne pas trouver le terrain, dans notre cas... Las Vegas ne nous effleure pas. Nous n'avons pas vraiment peur de nous perdre, nous avons peur de mal faire et de gacher ainsi notre plaisir. Une telle chance nous est offerte de vivre des moments aéronautique comme nul autre, que nous souhaitons faire de notre mieux.
Pour revivre ce que nous entendons dans nos casques, cliquez sur "Lecture" pour écouter l'enregistrement des fréquences. Nous, on est le Seven-Five-Foxtrot :
Je suis content de voir que tu suis les bons conseils du vol de nuit ;-) et oui, ça marche, surtout à Las Vegas ou tout est tellement éclairé!!!
Pour ce qui est des conseils en dormant, je confirme également. C'est vrai que si tu t'es déjà baladé dans le coin c'est plus facile mais je vais même te donner le truc: Il "suffit" de préparer un peu à l'avance. Par un peu à l'avance j'entends acheter la doc quelques semaines plus tôt et la laisser dans les chiottes. Chaque fois que tu y passes tu lis les cartes en imaginant ce qui te ferait plaisir comme balade. Tu alternes cela avec la doc. Au bout de quelques temps tu as une bonne idée de ce que tu vas pouvoir faire et sembler improviser tous les soirs ou même en vol.
En réalité tu gagnes du temps avec l'expérience car tu sais globalement où et quoi regarder et de quoi tu dois te méfier.
Après cette super balade je pense que tu as acquis une grosse expérience, tes récits sont vraiment enivrants. Maintenant il te reste une étape à franchir pour faire encore plus partager cette expérience avec d'autres: deviens instructeur!
Merci Christophe pour le conseil ;-) Il y a tant à faire... Et pour ceux qui n'auraient pas fait le rapprochement le "Christophe", c'est mon instructeur VFR de nuit que je cite dans ce récit et également sur une vidéo à propor de trois p'tites loupiotes rouge.
4 commentaires:
Enorme le coup de Marc-Olivier qui prépare nos nav en dormant. Et je confirme que c'est vrai !
(J'ai juste un doute sur le VOR Mickey)
Et je n'avais pas du tout réalisé que tu avais dit "LA Tower".
Raaaah ! (PJoke)
"Los Angeles Tower... Seven-Five-Foxtrot with you" LOL !!!
Ah le stress ! Je connais ça, et pourtant je vais sur des terrains minuscules qui n'ont rien à voir avec LA ou Vegas !
Encore merci pour vos récits :)
Je suis content de voir que tu suis les bons conseils du vol de nuit ;-) et oui, ça marche, surtout à Las Vegas ou tout est tellement éclairé!!!
Pour ce qui est des conseils en dormant, je confirme également. C'est vrai que si tu t'es déjà baladé dans le coin c'est plus facile mais je vais même te donner le truc:
Il "suffit" de préparer un peu à l'avance. Par un peu à l'avance j'entends acheter la doc quelques semaines plus tôt et la laisser dans les chiottes. Chaque fois que tu y passes tu lis les cartes en imaginant ce qui te ferait plaisir comme balade. Tu alternes cela avec la doc. Au bout de quelques temps tu as une bonne idée de ce que tu vas pouvoir faire et sembler improviser tous les soirs ou même en vol.
En réalité tu gagnes du temps avec l'expérience car tu sais globalement où et quoi regarder et de quoi tu dois te méfier.
Après cette super balade je pense que tu as acquis une grosse expérience, tes récits sont vraiment enivrants. Maintenant il te reste une étape à franchir pour faire encore plus partager cette expérience avec d'autres: deviens instructeur!
bons vols,
Christophe
Merci Christophe pour le conseil ;-) Il y a tant à faire... Et pour ceux qui n'auraient pas fait le rapprochement le "Christophe", c'est mon instructeur VFR de nuit que je cite dans ce récit et également sur une vidéo à propor de trois p'tites loupiotes rouge.
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