18.3.10

Désolé, mais je ne m’y fais toujours pas

Il y a des vols comme ça, auxquels on ne se fait pas. Une fois posé, les papiers faits, l’avion rangé, on remonte dans la voiture, on a du mal à s’en remettre et on s’interroge : Qu’est-ce-que je viens de faire là ? Tu te rends compte ? Incroyable.

Après plusieurs centaines d’heures de vol, on peut imaginer qu’une certaine routine s’installe lorsqu’on monte dans un DR400 pour faire St-Cyr – Dreux. Je ne renie pas ce genre de vols. Ils m’ont fait rêver, ils m’ont formé. Et ils resteront à jamais dans ma carrière de pilotaillon. Et j’en referais encore certainement des dizaines parce que tous les vols forgent l’expérience.

Le problème, lorsqu’on est passionné par le pilotage et que l’on traine dans ce milieu, c’est qu’on en veut toujours plus. Nouvelle machine, nouvel avionique, nouvelle destination, nouvelle rencontre. Surtout lorsqu’on a autour de soi des amis qui peuvent vous ouvrir des portes de hangar, des domaines de vol ou des destinations exceptionnelles.

Marc-Olivier fait bien sûr partie de ceux-là. Il est même certainement dans le Top 5. Et lorsque, je lui passe ce coup de fil ce matin, en sachant pertinemment, qu’il a sous la main une machine que je ne pilote pas souvent, je sais que cela va mal finir.

Lorsqu’on vole dans une machine comme un Cirrus après avoir enquillé des heures de Cessna 172RG, on a l’impression de ne pas faire la même aviation. Bien sûr, on vole… on vole dans le même ciel et avec les mêmes règles. Mais cela va un peu plus vite et on est mieux installé. On a aussi des interfaces homme-machine un peu différente. De plus, avec Marc-Olivier, on peut s’essayer à comprendre l’IFR.

En ce jeudi soir, le temps est calme sur le parking de Toussus. Après avoir fait le le plein et déroulé une Cartabossy sur l’aile en plastique du Cirrus, nous finissons par nous décider pour Rouen. Histoire d’être en l’air, de manipuler cette machine et, nous ne le savons pas encore, de nous rendre à un diner original.

A 180kts de vitesse sol, Toussus – Rouen est vite avalé, bien harnaché dans le Cirrus. Frédéric à la Tour nous gratifie d’un ATIS mémorable et nous prépare le plus beau balisage de la plate-forme. Base main gauche trop rapide, trop haut, trop “tout”, je pose comme je peux avec les conseils de Marc-Olivier, le Cirrus sur la piste 22. Une pizza plus tard à une centaine de pied de hauteur ;-), Marc-Olivier dépose un plan de vol IFR pour rentrer avant le couvre-feu de Toussus.

L’aller était inhabituel pour l’habitué des Cessna et Robin que je suis. Je savoure toujours autant ces vols. Le retour me laissera encore pantois. Je n’arrive pas à m’y faire. Etre totalement en guidage, filer au raz des nuages, contacter Orly… etc. Trop de choses sont inhabituelles pour un pilote VFR. Ce n’est pas la première fois que j’arrive en IFR sur Toussus de l’ouest avec la 25 en service. Et pourtant, j’ai la CPU à 100% pour anticiper et ne pas trop à la traine. L’interface homme-machine (GNS+Avidyne) occupe une bonne partie de ma disponibilité et l’avion file.

Verticale TSU, éloignement sur le 072 puis descente vers 4000 ft. A peine le temps de relever les yeux et de découvrir Paris illuminé sur ma gauche. Nous longeons la P23 au raz du périphérique. Orly rappelle et il faut tourner à droite, cap 290 pour intercepter l’axe de la finale 25. Villacoublay, puis Toussus en auto-information sont dans la casque alors que je descend sur l’ILS. Ouverture à droite puis retour sur la 25 (auto-information à Toussus oblige), je suis épuisé mais heureux lorsqu’on roule au parking. Une petite camionnette bleu à la loupiotte clignotant plus tard, l’avion rangé, on remonte dans la voiture, on a du mal à s’en remettre et on s’interroge : Qu’est-ce-que je viens de faire là ? Tu te rends compte ? Incroyable.

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