Une bonne raison de se lever à 06h00 du matin un jour férié pourrait être d'aller voler.
Le réveil sonne (donc) et immédiatement ma première pensée claire (à peu près) dans ma tête est "on va être en retard ! Faut sortir les avions ! Les préparer ! Embarquer tout le monde ! Et tout ça, avant l'activation du SUP AIP ! On y sera jamais et on va être obligé de rester au sol toute la journée !". La journée commence bien.
C'est un peu compliqué comme "première pensée" pour un réveil, alors cela vaut le coup que je vous raconte.
Depuis plusieurs semaines, nous sommes quelques pilotes à échafauder un plan pour aller voler le 14 juillet. L'objectif initial étant d'aller survoler, de nuit, les feux d'artifice sur la côte normande. Finalement, les plans "feux d'artifice vues du ciel" et VFRn seront remisés au "plan B pour 2009" pour cause de-tout-plein-de-problèmes-de-dernière-minute. Et dans "problème", vous pouvez mettre pèle-mêle : emport passager de nuit périmé, un terrain fermé à 22h30 loc pour un CS+30 à 22h20 loc, NOTAM du 13 juillet qui nous interdit de voler de nuit la veille pour récupérer le fameux "Emport passager de nuit", un autre terrain ouvert, mais qui interdit les tours de piste... etc... etc... On a eut quelques bâtons dans les roues. On verra en 2009 !
André et Patrick pendant la préparation du vol quelques jours avant =
épluchage de NOTAM, SUP AIP, consignes particulières, trajectoires planquées...
épluchage de NOTAM, SUP AIP, consignes particulières, trajectoires planquées...
A la dernière minute (c'est à dire la veille jusqu'à 01h00 du matin), nous changeons donc notre plan pour la journée du 14 juillet. Bien sûr en ce jour de défilé militaire sur les Champs-Elysés, tout l'ouest parisien est interdit de vol (sauf avec un girophare) de 09h00 loc à 17h00 loc. Il faut donc partir tôôôôôt.
Dans notre malheur, la ZRT1 interdisant les petits navions comme nous (pas bleu et blanc, ni rouge et jaune) s'étend de St-Cyr jusqu'à... Rouen (le premier stop prévu) et de la surface (SFC) jusqu'à haut (FL085), trop haut à moins d'avoir un truc avec une fusée capable de monter à la verticale dans l'épaisseur d'un trait noir d'une carte d'un SUP AIP. Blurps.
Il faut donc être posé à Rouen au moment de l'activation de la ZRT1 à 09h00 loc. Ca fait tôôôôôôôt. En comptant large, il faut donc être parti à 08h00 loc en ayant récupéré tout le monde et sortie les avions.
Pour gagner du temps, la veille (toujours) nous allons à l'aéroclub pour préparer les avions. Ceux que nous avons réservés sont bien sur au fond (tout au fond) derrière 3 rangés de 2 avions. Comptez bien, cela fait des tonnes d'avion à déplacer. Une fois pour les sortir, puis une deuxième fois pour les rentrer. Sans parler de l'avitaillement (à la main) en descendant vers la pompe, puis au retour (avion plein... forcément) en montant vers le hangar. C'est autant de calories brulés. Tant mieux. Mais j'en ai encore mal au bras et aux cuisses ;-)
La répartition des vols et des passagers est faite la veille sur le tableau blanc de la salle de briefing de l'aéroclub. Nous décidons donc de profiter de l'accueil de l'aérodrome de Rouen. A l'occasion de l'Armada 2008, le tapis rouge est déroulé pour l'aviation générale : accueil sur le tarmac, collation dans l'aérogare, essence à prix coûtant, taxe d'atterrissage offerte, navette gratuite aller-retour de l'aérodrome vers l'Armada. Que demander de plus ?
St-Cyr -> Rouen, puis visite de l'Armada (dernier jour, départ des bateaux), puis remontée de la Seine (en avion pour suivre la transhumance des voiliers) et l'aéroport de Caen pour un échange de pilote. Enfin, nous partirons vers le Mont St-Michel et un posé à Avranches (LFRW) pour un retour en fin de journée à St-Cyr avant le CS+30.
Lorsque nous échafaudons notre plan la veille, il faut être sacrément optimiste pour penser qu'on arrivera à tout faire. Il y a tellement de paramètres changeant : météo du matin, météo de la journée, retard qui nous coincerait à St-Cyr dans le SUP AIP... etc... etc... Nous partons motivés et volontaires ! Le plus étonnant est qu'on sera parfaitement dans notre timing prévisionnel tout au long de la journée !
Avec un levé à 06h00 du matin, je suis forcément en retard (mais c'est pas de ma faute promis !) et lorsque Georges et moi arrivons au terrain avec 30 minutes dans la vue, l'animation aux Alcyons est impressionnante. Nous ne sommes pas les seuls à vouloir partir avant le "couvre-feu". Un autre équipage est là aussi et des avions sont un peu dans tous les sens. Ca court et ça galope dans tous les sens. On cherche des VAC, on lit les TEMSI, on regarde la pendule. C'est une course contre la montre. "Qui a imprimé les NOTAM ?" "Quelqu'un a une TEMSI à jour ?" "Je veux bien un paquet de NOTAM, si vous en avez un en trop ?!" "Qui a les clef de l'avion !?" "Quelqu'un a un dossier météo complet ?!"
Patrick et André ont déjà sortie les avions. Nous arrivons un peu les mains dans les poches avec Georges. La boutade "Alors ! Mon avion est prêt !?" détend moyennement l'atmosphère. On sent que ca a tirer et pousser les avions. D'autres pilotes sont là aussi.
La météo crainte hier avec ses brumes matinales clouant au sol les départs VFR, ne donne pas signe de vie. Les TEMPO PROB30 remplis de BR des TAF LONG de la veille ne semblent pas vouloir montrer le bout de leur nez. Ouf.
Comme on a du temps devant nous (humour), les portes du hangar décident donc de sortir de leurs rails. Les imprimantes décident de ne plus avoir de papier, puis plus de toner. La photocopieuse décide de fêter aussi la prise de la Bastille. Tous les éléments sont contre nous. Et pourtant les deux avions sont au point d'arrêt 29R avant 08h00 loc. Notre plan "B : départ à 08h30 loc" et passage par Epernon pour faire le grand tour de la ZRT1 (cf. carte) ne sera donc pas activé. Le Kilo-Golf et le Mike-Charlie prennent leur envol en ce jour férié, dans le timing prévu et dans le calme d'un matin d'été. Ouf. Ca... c'est fait.
Au loin, Paris s'éveille
Notre première branche se déroule sans encombre. Le plus dur aura été de se mettre en l'air comme les autres appareils qui roulent à St-Cyr souhaitant échapper au SUP AIP qui nous coupe les ailes. En l'air, le ciel est peu encombré à cette heure-ci, à tel point que je demanderais au contrôleur d'Evreux où sont "tous les avions du défilé ?". "Au sol, mon bon monsieur ! Ils décolleront à la dernière minute vers 10h00". Nous, on sera posé depuis longtemps. Le ciel et les ZRT leur appartiendront.
Pour l'instant nous profitons de ce vol matinal admirant la lumière du matin et les vallées recouvertes d'une très jolie brume. A cette hauteur de brume, on ne peut les appeler des nuages.Nous apercevons des parapentistes aux Andelys alors qu'un planeur et son avion-tracteur passe du sud vers le nord se rendant on ne sait où.
Nous bifurquons un peu pour aller voir les deux voiles rouges, puis une montgolfière tout en donnant des infos. trafics au contrôleur d'Evreux qui semble les apprécier. Il les repasse au Mike-Charlie (Patrick juste derrière nous). On s'occupe comme on peu ;-) Mine de rien, il y a du monde déjà en l'air. L'air est absolument calme. Pas une turbulence. L'avion semble glisser dans sans effort.
Etant un peu en avance sur le Mike-Charlie de Patrick, je tente de me faire un petit plaisir. Je peste depuis le début de ce vol, car j'ai oublié les cartes IFR de Rouen. Imprimé et même manipuler (!!!) durant mon vol de Samedi (mémorable à lire par ici), je tâche de retrouver de mémoire le cap de l'outbound de l'attente (223 ou 227 ?) et l'altitude (peu importe en fait) et la fréquence de RN (voir le récit du vol de l'avant-veille). Heureusement, la VAC l'indique, les ILS étant présent même sur les cartes d'approche à vue. Ouf. Si ce n'est pas de la provocation pour tous ceux qui rêve de faire de l'IFR ! On va faire de mémoire pour l'attente, mais pour le reste, ça devrait tout du moins servir à la simulation d'IFR dans un avion VFR.
Je demande donc à l'approche de Rouen de rentrer sur le VOR pour y effectuer une attente IFR telle que publiée tout en étant VFR. J'y vais molo en m'attendant à un refus : "Pas de VFR traînant dans mes attentes IFR !". Le contrôleur acquiesce sans autre forme de discussion ("pas de problème") en me demandant de rappeler sur la balise et en restant VMC. Je saute sur l'occasion sans réfléchir. Il fait beau, pas de vent, personne dans le coin... que demander de plus !
J'en oublie, plongé dans mes cartes (virtuelles) et ma planche de bord, de prévenir André, assis à droite de jouer le rôle de mon Safety Pilot. L'erreur est corrigée quelques secondes plus tard. Il surveille maintenant dehors alors que je m'applique à l'intérieur. Je tiens les 2500ft et décide de la méthode d'entrée dans l'attente (Teardrop - Direct - Parallèle... je me remémore les cours d'Orbifly).
Vue l'arrivée sur l'attente, ce sera une décalée / teardrop sur ROU. Emportée par mon élan, je me trompe de 15 degrés (je pars à 45 degrés de l'inbound au lieu des 30 degrés). Malgré tout, j'estime correctement enchaîner mes TOP pour un pilotaillon VFR tendant de croire qu'il pourrait un jour faire de l'IFR. Mon virage standard se fait à une altitude constante et le taux semble tenu. Je reviens en rapprochement sur la balise, Patrick avec son autre DR400 est repassé devant, autorisé qu'il était à rentrer en base 22 main gauche. Lui est donc maintenant en finale (22 ou 23 ? Private joke).
Mon DR400 n'étant pas équipé d'un récepteur ILS (tout du moins pas de glide), je reste sur ROU alors que j'aurais pu passer sur RN pour suivre le localizer. On fera mieux la prochaine fois. N'ayant pas de DME, je joue avec le GPS de bord.
Trop à droite et tentant de tenir au vario ma descente, la vizi étant exceptionnelle, je continue ma descente, puis me remets dans l'axe pour tranquillement visualiser l'altitude de décision sur cette simili approche ILS. Que j'aimerais faire cela avec beaucoup moins de vizi... et en IFR ! Je suis presque tenté de rappeler 11 nm RN, mais non, décidément tu n'es pas IFR. Je me contenterais d'un "Kilo-Golf, on est en finale 22" bien décevant ;-)
A peine garé et moteur coupé, une voiture de l'agent de piste du terrain s'approche pour nous amener à l'aérogare. Là-bas, un café (gratuit) nous attends. Rouen sait recevoir. Quelques minutes après, c'est le chauffeur de notre navette qui vient nous chercher. Rouen met à disposition des équipages de l'aviation générale une navette gratuite pour nous emmener à l'Armada. Nous avons à peine le temps de remercier de l'accueil que nous voilà tous embarqué. Il faut y aller.
Pour l'instant, nous sommes pile poil sur notre timing et on pourrait presque s'arrêter là. Mais non, il est 09h30. La journée ne fait que commencer
La suite de cette journée avec un slalom au raz d'une ZRT, une navigation à des altitudes incroyables pour moi (le FL065 !!! Krévindiou) et un embourbage de DR400... à suivre très bientôt...