6.7.03

Une grasse matinée ratée (épisode 8)

Il n’y a pas encore si longtemps lorsque je voulais voler dans flight, je choisissais un avion, me positionnais directement sur la piste et allait découvrir une scène nouvellement installée. Lorsque l’ATC de FS2K2 a fait son apparition, j’ai pris l’habitude de partir du parking (gros progrès !) pour passer successivement du sol à la tour et patati et patata...

Après avoir découvert IVAO, juste après Noël 2002, mes vols démarrent maintenant invariablement par le chargement de toute la quincaillerie :
- Boot du 2ème PC qui sert de PC pour les communications,
- Simultanément, chargement de Flight Simulator sur le PC principal
- Depuis la page d’accueil de FS création de la session multi-joueurs.
- Lancement de WideClient et vérification du chargement automatique d’ActiveSky (coup d’œil au METAR), puis de SB Host et enfin de Squawkbox.
- Connexion de tout ce petit monde.
- Transpondeur sur Stand-by (toujours les bons réflexes), mise à jour du plan de vol…

… et ainsi de suite jusqu’au clic Roger Wilco : « Fare Tour de Fox-Victor-Bravo, bonjour ! ». C’est une mécanique bien réglée et je m’étonne d’être souvent prêt au parking de Fare en - à peine - plus de 10 minutes.

Driiiiiiiiiiiiiiiiiinnnngggggggg. Aaargh. Driiiinnng. (re)Aaargh. Le réveil. Dimanche 9h15. Grand blanc de plusieurs minutes. Ouverture de la deuxième paupière. 9h25. Toujours le même dimanche. Si je veux aller à St- Cyr pour accueillir Patrick de son retour de (presque) 1er vol, il faut que je me décide maintenant. Patrick (collègue de bureau et pilote/contrôleur sur IVAO) inaugure son inscription aux Alcyons (le même aéroclub de St-Cyr que moi). Le vandale, a pris le créneau de 8h30 à 10h00… un dimanche matin. 8h30 du matin un dimanche matin (si…si… le matin). C’est malin. Tout ça pour éviter que je me lève tôt et aille l’embêter : photos, commentaires, rumeurs…

Et puis tiens, mon lâché solo est déjà loin derrière moi. A plusieurs reprises, Xavier (mon instructeur) m’a proposé de faire des tours de pistes solo pour m’entraîner. Ce serait un doux euphémisme que de dire que j’étais plutôt trouillard (limite anxieux… tendance : « je pars en courant »). Un tour de piste pour le lâché, d’accord. Le laché c’est simple, après tout. L’instructeur descend de l’avion, te dis de faire ça et ça… toi tu es dans l’avion donc tu t’exécutes. Forcément tu ne peux pas descendre avec lui et laisser tout en plan. Baah naaaan.

Mais plusieurs tours d’affilés, conscient, volontaire, de soi même, sans contrainte alors qu’on pourrait rester au lit à faire la grasse mat’, ce n’est plus du tout la même chose. Monter dans un truc tout seul (sans instructeur donc), pour voler (au dessus du sol donc) à 200 km/h (plutôt vite donc) et ramener l’engin au sol correctement (en se posant donc), ce n’est plus la même chose.

Ce dimanche matin, motivé par l’envie d’accueillir Patrick et p’t’être bien de faire un vol en solo (mais un petit, alors)… j’ai donc battu le record du monde de la « douche-préparation-rien-oublier-trajet-domicile-St-Cyr ». Tout ça en respectant les limites de vitesse. Oui, monsieur. 10h15 : j’arrive au terrain. Un Robin DR-221 est au parking. C’est F-BOZP (« Zizi Pouette Pouette » pour les intimes, paraît-il). Pas de Xavier, ni de Patrick en vue. Serais-je arrivé trop tard ?

Je me précipite dans le club et m’empare du planning. 1er point : c’est bien aujourd’hui qu’ils volaient. Je fonce vers la feuille de prise des avions. F-BPRT est bien dehors et n’est pas encore rentré. 2ème point : Ils sont encore en vol. Je ressors, traverse le hangar en courant et me poste sur le taxiway. Je scrute l’horizon. Rien. Pas de Romeo-Tango. Deux avions en tour de piste. Déçu, je me dis qu’il faut bien que je m’occupe. Je retourne dans le club. Et bêtement (c’est le bon mot) j’inscris mon nom sur le planning. Bêtement, je viens de me réserver pour l’heure qui suit l’autre DR-221, Zulu-Papa (pas de commentaire). Tout seul, sans instructeur. Comme c’est la première fois que je fais ça, bêtement (encore) je demande à un permanent du club s’il ne faut pas remplir un autre document, un autre planning, s’il y a un truc spécial à signaler… je suis un débutant attentionné, sauf que je pose une question un… peu maladroite :

- « C’est la première fois que je prend un avion, je vais faire des tours de piste tout seul… y-a un truc à faire de particulier ?».

En réponse j’ai eut droit à un regard bizarre, mélange de surprise « Il veut prendre un avion tout seul et il a jamais piloté ? » et d’horreur « mon dieu, un fou !!! ». J’anticipe la méprise et évite à Junker (le surnom de ce permanent) de chercher une réponse intelligente à ma question idiote.

- « Pas de panique, euh…. J’ai déjà été lâché… euh… Xavier m’autorise à faire des tours solo, c’est juste que je voulais m’assurer de ne rien oublier ».

Le malentendu passé et quelques éclats de rires plus tard, je prends les documents de Zulu-Papa et (toujours inconscient) je me dirige pour la visite prévol. Je suis tout seul et semble-t-il en parfaite santé. Comme pour mon lâché, je fais les choses méthodiquement et automatiquement. Je pose mes affaires sur la banquette arrière de l’avion. Il n’y aura que les miennes, je peux m’étaler.
- Batterie sur MARCHE, puis Nav, Strobe et phare sur MARCHE
Je sors et fait un premier tour de l’avion pour vérifier l’éclairage. De retour dans le cockpit :
- Nav, phares et batterie sur ARRET

Deuxième tour de l’avion en inspectant minutieusement toutes les parties mobiles (boulon, écrou, sécurité… boulon, écrou, sécurité), le niveau d’huile (« entre 5 et 6 » alors que je ne sais même pas où est l’huile dans ma voiture), les fixations, les pneus… et patin couffin. Je suis toujours tout seul. Personne alentour. Je savoure plus que je n’angoisse. Je prépare mon vol.

La prévol terminée, j’allume la batterie et regarde le niveau d’essence. Aie… une vérification sur le carnet de vol de l’avion : il me faut aller faire le plein du DR-221.
Je distingue alors un avion à train classique qui arrive dans le circuit. Les voilà, enfin. Bizarrement d’ici, je sens déjà qu’il y en a au moins un qui prend son pied. L’avion se pose hors de ma vue, dans le « trou » au début de la 12 gauche.

Le Robin remonte tranquillement au parking. Je commence à distinguer les visages. Patrick concentré, attentif arbore un sourire. Le moteur s’arrête. La verrière s’ouvre. Je croise le regard du pilote. Et là soudainement en un éclair je devine que Patrick a vraiment pris son pied. Il n’a pas le regard du gamin qui descend du manège la tête pleine de souvenirs et de truc à raconter. Non, il a la tête du gars qui vient de se rendre compte qu’il vient d’ouvrir la boite de pandor. Il vient de passer 35 minutes qui ne sont que le début. Ca vient juste de commencer. Il vient de mettre des piles dans le machin. Des piles alcalines. Il vous racontera - peut-être - lui-même ces 35 minutes et la suite.

Xavier, notre instructeur, passe la tête au dehors du Robin.
- « Eh bien vous faîtes une chouette équipe tous les deux ! »

Encore ne sait-il pas que j’ai l’intention de faire des tours de piste. Alors, j’y vais, j’y vais pas ? Je les fais ces tours de piste solo comme me le conseille depuis mon lâché mon instructeur ?

Toujours est-il que dimanche dernier, j’ai raté ma grasse mat’. Quel bonheur.

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