Aux Etats-Unis, c’est une expression qui revient souvent lorsqu’on vole dans des petits coucous : “Suffit de demander”. Quand on est élevé en France comme moi, on est surpris des libertés accordées ici, de l’autre côté de l’Atlantique.
Ce sixième jour restera une journée incroyable. s’il n’y en avait qu’une. C’est l’avant dernière. Une journée comme si peu d’autres où l’on demande aux ATC si l’on peut faire certains trucs comme descendre la plage de Miami à 500 ft, sous les départs de Miami International, puis remonter toute la Floride à bord d’un tout petit Cessna 172 pour aller se poser à… Atlanta International, l’aéroport le plus fréquenté… du monde. J’avoue tout, mais vous vous en doutiez, c’est Marc-Olivier qui a eut l’idée.
Et là, ce n’est que la partie nord d’Atlanta… en finale 08L
“Miami Vince” ou Radada à Miami
Programme du matin : départ de Miami International. Pas Opa-Locka, non… non, l’aéroport international de Miami (KMIA). Nous avons dans l’idée de descendre le long de la côte de North Miami jusqu’au port en passant par Miami Beach et South Beach, puis de tourner dans downtown. Au feu à droite.
Rien de compliqué, il suffit de demander et d’avoir une altitude qui ne perturbe pas la classe BRAVO. Et hop, vous voilà en vol descendant la côte. Bien sûr, puisque forcément on va sortir des sentiers battus de la phraséo. OACI et que je ne suis pas adepte des noms de localité du coin, j’ai laissé la radio à Marc-Olivier. Je veux bien en profiter avec mes yeux, mais n’imagine pas de me voir refuser cette petite promenade au raz de la plage pour une histoire d’accent.
La tête la Bravo telle qu’on peut la voir sur la TAC de Miami
Cap au sud, le spectacle est du côté droit, celui de de Marc-Olivier, mais en tendant le bras droit pour tenir la GoPro, tout en maintenant l’assiette du Cessna de la main gauche, on arrive à quelque chose d’à peu près montrable, n’est-ce-pas ?
A mi-chemin, on aura droit à de l’info-trafic avec un Mooney (ou un Bonanza… enfin un truc comme on en croise tant ici) sens opposé 500 ft plus haut. On est pas tout seul à se promener dans le coin.
Puis, on vire à droite, vers le centre ville, à la limite de la classe Bravo qui démarre au sol. Le port de Miami, puis l’hôtel Intercontinental où nous étions défilent sous les ailes.
Virage à droite sur South Pointe
Everglades
Bon. C’est pas tout ça, mais on a pas pris trop d’essence à Signature (le FBO)… Juste de quoi faire sauter (on dit “waiver” ici) les frais de handling et le Ramp Fee (progressons en anglais). Grâce à Foreflight sur l’iPad de Marc-Olivier, on a repéré un terrain avec un Self Serve pas cher. En plus, c’est sur les Everglades, ça tombe bien, on ne les voyait pas bien de nuit, la dernière fois qu’on est passé par là pour aller à Tampa. Allons donc sur ce terrain privé nommé peu romantiquement “X01”.
Final piste 15 à X01, Everglades
Le N567DD à la pompe aux Everglades
Kissimee
Nous n’avons pas oublié notre volonté aussi de recherche une meilleure base qu’Air America pour un futur FarEast. A Naples, nous avions été déçu. Entre, les sociétés qui ne permettent pas d’aller aux Bahamas et ceux qui demadent un checkout spécial Bahamas (un aller-retour), nous étions resté sur notre faim. Nous avions aussi eut un contact avec Sunstate à Kissimmee (KISM). Ca tombe bien, c’est sur la route d’Atlanta. On s’arrêtera pour discuter (enfin surtout Marc-Olivier ;-)
Passage on-top entre Everglades et Kissimee (150nm pour moins de 1h30)
Parking de Sunstate à Kissimee un peu tristouille, alors qu’un T6 décolle
Puis on redécolle de Kissimee, avec toute la zone des parcs d’attraction
Cedar Key
Bon, c’est pas tout ça, mais après avoir donné à boire de la 100LL au Cessna à Everglades, c’est l’équipage qui a faim et soif, maintenant ! On prévoit donc une troisième halte avant le feu d’artifice final. Déjà plus de 300 nm et la journée n’est pas finie. Destination : Cedar Key (KCDK). Antoine D. que nous avions croisé au départ de Daytona Beach nous avait recommandé ce terrain. Il fallait appeler la chauffeur de Taxi (prénomée Judy) sur la fréquence Unicom du terrain (122.9). Elle veillait cette dernière et arrivait juste après votre atterrissage. On nous avait aussi prévenu qu’à Cedar Key, il y avait de l’eau à chaque extrémité de la piste. Si vous ne faites pas la piste, pas d’échappatoire, c’est le plongeon assuré ! Seul réflexe : la remise de gaz.
Forcément, j’y ai pensé en arrivant. L’indication du vent sur le G1000 est bien pratique. On a - bien avant l’arrivée - et tout le temps où on se rapproche, l’orientation attendue et la force en noeuds (cf. photo ci-contre). Que demander de plus ! On peut donc se préparer pour l’intégration, savoir quelle piste active. Après il reste l’état du terrain et bien sûr tous les trafics s’y trouvant. Mais la recherche de la manche à air est moins stressante ;-)
Avec cette histoire de flotte à chaque extrémité de la piste, je râte forcément mon approche. Trop stressé… trop haut, trop vite… et forcément je repense à ce que tout le monde a dit “si tu ne fais pas la piste, tu es sûr d’aller à l’eau”. Alors je ne réfléchi pas longtemps… Assiette… Puissance… Remise des gaz et on repart dans un tour de piste main gauche, plutôt court (short circuit komkikize ici). J’espère juste que Judy ne vas pas croire qu’on s’en va !
Deuxième approche, bien plus stabilisée, vitesse, axe et pente maîtrisés… Je pose le Cessna proprement. Alors qu’une autre machine a gentiment patienté au point d’arrêt, tout proche du parking. Ce que l’on voit à gauche de la piste, sur la vidéo et les captures n’est pas un taxiway, mais bien une route.
Un avion nous salue d’un bâtement d’aile
Judy arrive avec son taxi pour nous amener en ville
Déjeuneren terrasse à Cedar Key
Départ de Cedar Key vu par le MFD et la fonction
NRST qui permet de trouver la fréquence ARTCC la plus proche
pour demander le Flight Following
La tour : “Keep up good speed !”
Puis l’idée du jour ;-) est d’aller dormir à Atlanta. Outre la longueur de la promenade (après tout c’est un FarQuelqueChose), c’est surtout la destination qui peut impressionner. Je rappelle que nous sommes en Cessna 172. Un truc avec 1 moteur, 4 places et qui vole à 120 kts environ (dans les bons moment pour ce qui concerne N567DD affectueusement appelé DéDé). Nous souhaitons aller sur le terrain avec le plus de mouvements au monde en 2010 et le plus de passagers. C’est THE hub de la compagnie Delta. De Gaulle est loin derrière (10ième).
Le classement 2010 des aéroports (Airport Council Intl, 2010)
par nombre de mouvements
Atlanta Hartsfield représente 717,001 mouvements alors que CDG sur la même péride n’en a eut que 377,959 (chiffre de janvier à Septembre 2010).
On décolle donc d’un terrain désert, tout neuf avec un Self Serve abordable en auto-info. Une fois les 8,500 ft atteinds, on appelle le centre du coin et on demande du Flight Following. C’est aussi simple que ça. Jax Center (Jacksonville Center) sur 132.3 :
Jax Center : “Vous confirmez vouloir aller à Hartsfield ?” (Hartsfield est le nom d’Atlanta International).
Moi : “Oui monsieur !”
Jax Center : “Et bien il va falloir qu’on se coordonne”.
Et c’est tout ! Pas de “zêtes fous ?” Pas de “Ah non, selon le nouveau Sup AIP, Notam bidule, truc anti-machin, c’est pas possible, monsieur”. Il suffit de demander. Et ils se coordonnent. Mais comment font-ils ? Bien sûr, il vaut mieux avoir un MOM assis en place droite. Okazou la phraséo partirait dans les méandres de l’américain-non-OACI. Et même pas. De mon unique expérience, c’est simple. On te donne des caps, des altitudes, si tu comprends que tu es sur un aéroport où-ça-n’arrête-pas-une-seconde, tu fais court, rapide, simple, efficace, propre.
La carte du terrain d’Atlanta ;-)
J’espère me rappeler tous les détails de cette approche vectorisée, passant à l’'ouest, presque sur les numbers des pistes 8 et 9 (ils ne disent pas le zéro ici). Je tiens scrupuleusement mes 4.000 ft assignés en passant au dessus des avions de Delta qui se posent ou décollent sans arrêt. Puis toujours guidé radar par des caps et des altitudes, je descends en vent arrière pour la 8L, puis j’entends qu’on est 2ème “caution wake turbulence, runway 8L, cleared to land” à suivre un CRJ en finale et un 757 sur la parallèle. Ouf.
Ici, bien sûr pas de préparation machine peinard en vent arrière. On est pleine patate tout du long de l’intégration. Si on peut appeler cela comme ça. C’est la première fois que je fais une finale plein gaz, dans l’arc jaune du badin qui indique allègrement 140 kts et la contrôleuse de la tour :
Tower : “Vous avez un CRJ derrière vous, 4 nm finale, gardez une bonne vitesse (Keep up good speed)”.
Moi : “I keep my best speed” (souvenir de Mc Carran)
Je regarde le badin ou plutôt l’échelle sur le PFD du G1000. C’est tout jaune (je suis au delà de l’arc vert). 140 kts ! En finale ! Et ce n’est pas en longue finale. Je vois la rampe de la 8L, l’immense terrain est devant moi. Toujours 140 kts. J’ai cru tout à l’heure, alors que je regardais la partie au sud de l’immense pieuvre (toutes les gates) des avions que c’était le terrain. Déjà immense. Et pourtant, ce n’en était que la moitié !
La radio de la tour continue à balancer des “Cleared to land” dans tous les sens. Il n’y a “que” 5 pistes parallèles ;-) Dans l’avion, c’est calme. Pas de blabla inutile. Tout le monde (on est que deux ;-) est concentré et je tâche de faire le plus “proprement possible". J’essaie de savourer et ne pas m’emporter. Marc-Olivier est prêt à manipuler les volets d’une main et tiens sa caméra de l’autre. A quelques mètres du seuil, je casse la descente et la vitesse… 110 kts… volets 10… puis volets full… la vitesse descend encore… l’avion aussi doucement… ça se présente bien… C’est immensément large ces pistes… On a repéré les taxiways de sortie… faut dégager par la gauche… je suis à gauche de la ligne… La vitesse diminue… J’arrondi… Ca continue dans les oreilles à passer des tonnes de messages… Un peu à gauche de l’axe… je tire sur le manche… Le Cessna se cabre… L’avertisseur hurle… touch down ! Contact à Atlanta !
Nous voilà posé à Atlanta, Hartfield International. Le plus gros terrain du monde. Un lundi en fin d’après-midi, certainement pas loin de l’heure d’affluence. Il n’y a pas eut de bordel sur la fréquence, les contrôleurs nous ont inséré dans le trafic entre des CRL, ERJ, Airbus et autres Boeing. Personne n’a crié, ni s’est étonné outre mesure.
Sur “point-niner” (sol/ground sur 121.9), on a droit à un “are you familiar” et un taxi assistance pour rejoindre le FBO (Landmark qui remplace Atlantic) où deux marshallers nous attendent pour s’occuper de notre petit Cessna. L’un d’entres-eux tente de mettre la calle pour gros navion sous le carénage du train principal du petit Cessna. Forcément, ça ne rentre pas. On les sens pas équipé à gérer des 172. La pression est retombée.
Le soleil se couche sur Atlanta. Nous avons 600 nm dans les pattes. Je suis parti ce matin de Miami International et je viens de me poser avec mon Cessna sur le plus gros terrain du monde à Atlanta International. Aux Etats-Unis, c’est un non-évènement. Pour moi, ça restera toujours une journée exceptionnelle.
11 commentaires:
Rhâaaaaa !!!!
Pour avoir été plusieurs fois au Etats-Unis et plus particulièrement en Floride je peux dire que l'aviation c'est un autre monde la-bas ...
Tout simplement extraordinaire.
Si seulement certains ici pouvaient en prendre de la graine.
Félicitations à vous 2.
rahhh tu me donnes de idées :)
Impressionnant ! :)
Un régal ce récit...Extra !
En effet c'est un autre monde.
Max,(petit FW2010)
Sacré atterrissage, tu devrai atterrire de nuit a L.A un jour, tu verrai ce que ça fait de voir 15 avions derrière toi, pour la majorité des boeing et crj ^^ quand tu est dans le circuit !
A quand la qualif flotteur pour le cessna 172 ? ^^ ;) et au fait, jolie les maisons de style colonila a cedar key :)
Salut, j'ai découvert récemment ton blog. Les récits sont un vrai régal et les vidéos de grande qualité !
Un rêve pour beaucoup de pilotes amateurs...
Très bon blog, je l'ai découvert par la fameuse vidéo "Is there an instructor on board", un régal :D
Quelle aventure, Miami puis Atlanta, alors que tenter un CDG ou ORY en France c'est la crise de l'ATC assurée !
Bons vols.
On s'y croirait... c'est vraiement sur la todolist des choses à faire une fois dans ma vie ce genre de Farwest ! Merci de me faire rêver en attendant !
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